« Retour à Berratham » d'Angelin Preljocaj.
Un grillage entoure la scène, des murs de grillage qui permettent à trois personnes de prendre de la hauteur. Deux hommes se font face avec droiture, les mains dans le dos. Une femme nous fait face.
Ces trois-là parlent, ils racontent le retour à Berratham d’un jeune homme qui avait quitté cet endroit de son enfance juste avant la guerre, il retrouve l’enfance détruite et vicieuse et son amour saccagé.
Au centre de la scène, on y danse, on y danse le retour à Berratham d’un jeune homme qui avait quitté cet endroit de son enfance juste avant la guerre, il retrouve l’enfance détruite et vicieuse et son amour saccagé.
Parce que ces trois qui sont en haut racontent avec ce que certains critiques ont appelés de la neutralité, mais s’ils racontent le plus souvent les mains dans les poches, le sourire en coin, la voix lourde, qu’ils évoluent dans les hauteurs ou au travers de ce qui s’affaire en bas, cette neutralité devient désinvolture et l’arrogance du démiurge, celui qui détient le pouvoir de la parole.
Il y a, dans cette mise en scène de Preljocaj, une domination du pouvoir de la parole sur la parole du corps car cette dernière s’échine à dérouler la même histoire que dans la parole du haut. Mais là où la danse ouvre des portes de sens, la parole va venir les refermer dans sa linéarité narrative.
La parole se veut forte, veut passer avec et en force au détriment de ce qui danse dans la pénombre de la scène. Ce qui danse va également se trouver bien amoindrie par la parole qui précède de peu, reléguant ainsi la danse à une simple illustration de ce qui est dit. Des illustrations souvent maladroites et bien lourdes où le cri permet la rupture entre deux atmosphères.
Ce rapport de force pris en déséquilibre fatigue, épuise le regard.
De retour à Berratham, Preljocaj semble douter du pouvoir du corps pour traverser les horreurs de la guerre mais souviens-toi Preljocaj, souviens-toi de « NON » de Zad Moultaka qui mettait en contrepoint à un zapateado flamenco les bruits de bombes qu’il avait enregistrés pendant son enfance au moment de la guerre civile au Liban (festival d’Avignon 2009).